mardi 8 octobre 2013



Quel paradigme pour la clinique aujourd'hui ?



Journées d\'étude du Collège de Psychiatrie à Clermont-Ferrant (21 et 22 octobre 2006)
Lors des dernières journées du Collège de psychiatrie organisées à Clermont-Ferrand et intitulées \"Troubles et Symptômes en psychiatrie, nosologie ou compilation ?\", Jean Garrabé, rappelant la mémoire de Georges Lantéri-Laura, se demandait s\'il ne fallait pas faire notre deuil d\'un paradigme pour parler de clinique. Nous ne pensons plus, il est vrai, en termes d\'aliénation ou de grandes maladies mentales typiques et intangibles. Il n\'est pourtant pas inutile de déterminer s\'il y a responsabilité dans le passage à l\'acte d\'un patient, comme il n\'est pas sans conséquence pour la pratique de distinguer une véritable érotomanie d\'une hystérie mordue de son objet.
Les mots de la clinique classique nous parlent et nous ordonnent encore car plus qu\'affaire de classification, il s\'agit de questions essentielles à tout abord de la subjectivité : qu\'est-ce qu\'un délire, une interprétation, une fabulation ? Qu\'est-ce que l\'imagination ou la revendication ?
Tous les signifiants de la nosographie nous interpellent dans leur dimension intrasubjective mais également sociale et politique.
La psychose d\'un seul - casuistique - éclaire sur les folies du monde. Ainsi les psychoses passionnelles. Nous ne pouvons pas dire que les structures cliniques aient perdu de leur intérêt même s\'il faut préciser la notion de structuralisme en psychopathologie, comme Lacan l\'a proposé avec Lévi-Strauss et F. de Saussure, mais aussi avec le concept de castration et celui... d\'aliénation revisitée par l\'Autre.
Nous nous référons, comme praticiens, à la paranoïa, à la phobie, à la perversion même si la pression culturelle du moment rend \"normale\" la peur du prochain, l\'isolement narcissique et les jouissances partielles.
La clinique structurale nous guide dans notre abord de chaque nouveau \"cas\" nous permettant de lire au travers des fictions - fiction au sens de J.Bentham, nomination d\'un bout de réel-, que sont les entités cliniques, l\'atypicité qui est toujours la règle.
Remarquons que la tradition des aliénistes comme la lecture en structure n\'empêchent nullement d\'être saisi par l\'inattendu, l\'inusité, l\'inouï. Nous n\'avons pas à sacraliser les essais d\'unification de la casuistique et de la nosographie : allemande, française ou italienne, la clinique est avant tout invention de mots et d\'abord ceux des patients eux-mêmes.
Faut-il pour autant accepter le démantèlement qui va s\'accélérant réduisant les symptômes et les phénomènes à des catalogues de troubles et de signes purement statistiques ?
La proposition d\'une clinique sans théorie et sans doctrine a séduit une génération élevée dans le relativisme ambiant et l\'éclectisme affiché. Cette épidémiologie sans âme commence à montrer ses aspects pervers, y compris Outre Atlantique, en particulier sa complaisance intéressée à l\'endroit de l\'industrie pharmaceutique.
Même s\'il ne l\'a pas proposé comme nouveau paradigme, Lacan a montré l\'efficace d\'une pensée articulée sur les trois catégories travaillées tout au long de son séminaire, l\'imaginaire, le symbolique et le réel. La question de l\'objet s\'est trouvé complètement renouvelée et les conséquences pour la clinique en sont encore à établir tant elles sont riches et ouvertes.
Rien que de pouvoir dire \"clinique du fantasme\" est un fil rouge inestimable pour le praticien car les manuels qui inondent notre discipline sont sans parole et sans sexe. Paradoxalement, la clinique dite classique parle toujours à sa façon de notre relation au désir même si c\'est pour souligner, dans la psychose, la défection fantasmatique. Le nouage des trois consistances par la grâce d\'un objet est une façon résolument moderne d\'envisager la clinique car s\'acceptent alors des paradoxes féconds mais inimaginables dans une vision trop traditionnelle ;
Nous pouvons ainsi suivre les pistes ouvertes par Ch. Melman concernant une \"nouvelle économie psychique\" et travailler parallèlement les formes actuelles de l\'hystérie ou les étonnants symptômes obsessionnels du jeune enfant. Nous pouvons avec M. Czermak prendre la matrice de la pente monoorificielle de toute psychose ou de la despécification pulsionnelle, bousculant au passage le cloisonnement des grandes configurations - paranoïa, mélancolie...
Paradigme moins unifiant et unifié par conséquent même s\'il ne cède en rien à l\'ultrapragmatisme scientiste à l\'oeuvre dans notre discipline.
Lacan, souhaiterait qu\'on puisse ajouter à la clinique qu\'elle soit analytique mais aussi bien psychiatrique, au sens noble.
Faire son deuil d\'un grand UN ne nous dispense pas d\'un travail de nomination, moins fétichisé sans doute, moins enchâssé dans un nom propre, peut-être.

Les violences, le sexuel, l'interdit de l'inceste

 Les violences, le sexuel, l'interdit de l'inceste Cliquez ici