vendredi 27 octobre 2006



Dis-moi ton fantasme, je te dirai...





"Je veux me détacher de lui...
Je veux me l'attacher
Je veux l'attacher"

En une seule séance cette jeune patiente livre sa fantaisie dominatrice, habituellement dissimulée sous la plainte continuelle d'être moralement maltraite par les hommes.
Comme Freud l'indique, il suffit d'enlever la négation. Comme Lacan le démontre, le sujet et l'objet viennent à s'équivaloir et pas seulement dans la psychose.
Nous sommes souvent surpris par cette clarté du fantasme, son évidence et sa simplicité, parfois dès les entretiens préliminaires.
Mais si le fantasme se livre ainsi à ciel ouvert, pourquoi le considérer "inconscient" ?
Nous pouvons, dans un premier temps, reprendre le raisonnement freudien du fameux "un enfant est battu" :
"Le être-battu de la fantaisie masculine, comme je le nommerai ici brièvement, et j'espère sans malentendu, est tout aussi bien un : être aimé au sens génital, rabaissé par régression. La fantaisie masculine inconsciente ne s'est donc pas énoncée originellement : je suis battu par le père, comme nous l'avions dans ce qui précède posé provisoirement, mais bien plutôt : je suis aimé par le père.
Elle a été transmuée, par les procès bien connus, en la fantaisie consciente : je suis battu par la mère".
Je veux l'attacher est une formule qui a la force de l'équivocité et la double valence dont parle Freud - amour et fustigation ou position passive masochiste et renversement sadique ; simplement les observations freudiennes sont toutes ramenées à la grille de lecture du complexe d'Oedipe.
Allons-nous dire aujourd'hui que la liaison incestueuse au père est le point fondamental du fantasme secondaire déployé autour du signifiant "attaché(e)" ?
Est-ce cela le réel inouï, la jouissance indicible que Lacan ne peut qu'écrire ?
"...ce qui demeure dans l'inconscient chez les deux sexes, ce n'est pas la fantaisie (passive) d'être aimé par le père, mais bien la fantaisie masochiste d'être battu par lui".
Le scénario imaginaire parce qu'ubiquitaire, c'est-à-dire pour finir cause générale de toute névrose est un serpent qui se mord la queue.
Comment interpréter sans chercher maman sous papa ou papa sous maman ?
Restons-en à la lettre.
Nous ne savons pas ce que désigne l'.
Peut être tout simplement tout ce qui est séparé, détaché. Fantasme courant d'une rencontre enfin réussie, complète. Cette patiente ne quittait jamais vraiment un amant quand elle en prenait un autre ; elle pouvait ainsi à juste titre dire plutôt l'homme qu'un homme ou que tel homme quand elle évoquait ses expériences amoureuses. C'est la mathématique à l'oeuvre, mathématique de jouissance que cherche à désigner Lacan
dans ses objets qui sont bien davantage configurations qu'objets partiels : sein, fèces, voix et regard.
C'est ce passage qu'il est difficile de ne pas saturer de signification, de narration et de reconnaissance oedipienne. Comment identifier cet objet ? pas uniquement reconnaître le petit scénario masturbatoire qui nous accompagne en tout lieu et nous est parfaitement familier. Tout l'enjeu d'une cure est là.
Comme le disait récemment une amie qui m'est chère : nous ne savons plus entendre la formule inlassablement répétée, "le sujet se fait objet du désir de l'Autre".
Qu'est-ce que se faire objet, que veut dire objet du désir, quand sait-on qu'il y a de l'Autre ?
Faut-il mieux dire enfin "le sujet se fait l'objet du désir de l'Autre ?"

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